En octobre dernier, les voiles iconiques de la façade de l’opéra de Sydney se transformaient en espace publicitaire pour faire la promotion d’une course hippique. Des milliers de personnes s’opposaient à l’utilisation à des fins publicitaires de ce patrimoine classé : une pétition rassemblait 230 000 australiens contre la « vente » de l’opéra.
En France, certaines marques profitent de très grands espaces lors de travaux de rénovation de monuments nationaux pour afficher des publicités XXXXL. On se souvient en 2014 d’Apple et de sa bâche de 110 m2 sur la place des Vosges à Paris… et toujours Apple avec sa bâche de 775 m2 sur le quai des Orfèvres l’année suivante. Depuis 2007, un décret a modifié le Code du patrimoine et a autorisé les monuments historiques à recourir à cette source de revenus en cas de travaux extérieurs nécessitant la pose d’échafaudages. La loi n’impose aucune contrainte en termes de contenu ou de visuel. En revanche, il existe une contrainte de taille (l’affichage ne peut excéder 50 % de la surface totale de la bâche) et de délais (l’affichage ne peut dépasser l’utilisation effective des échafaudages). Enfin, il y a une restriction financière : les sommes retirées de la publicité doivent être intégralement dédiées à la rénovation extérieure du bâtiment. Dans la réalité, la loi n’est pas respectée. Dans le cas d’Apple, la surface publicitaire recouvrait la totalité de la bâche, Apple finançait des travaux à l’intérieur du bâtiment et l’affichage est resté longtemps. Au-delà des besoins de l’échafaudage.
Pourtant, en 2016, le tribunal administratif de Pairs condamnait la Ville de Paris pour avoir utilisé les sites protégés du Champ de Mars et des Champs-Elysées à des fins publicitaires lors de l’Euro 2016.
Alors, qu’en est-il aujourd’hui ? C’est le comble de l’ironie : le Code du patrimoine autorise ces publicités gigantesques… là où le Code de l’environnement l’interdit.
Les personnes favorables au financement des travaux de rénovation de monuments ont donc le Code du patrimoine pour eux. Celles qui pensent que ces bâtiments ont une dimension publique voire sacrée qui exclut toute affichage consumériste, ont le Code de l’environnement pour eux (article L.581-8).
La bataille juridique n’est pas prête d’être terminée !